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26% pour soigner ?

Par : Elmano Endara JOSEPH


Le MSPP se voit allouer 18,8 milliards de gourdes. Un chiffre flatteur, une façade budgétaire bien astiquée. Solide sur le papier, mais friable dans la chair du pays. Soixante-quatorze pour cent pour faire tourner la mécanique administrative : les bureaux, les salaires, les cérémonials bureaucratiques. Vingt-six pour cent pour soigner, pour panser des plaies béantes, pour tenter de sauver ce qu’il reste d’un système à l’agonie.


Dix mille quatre cent soixante-deux agents publics. Un million huit cent mille gourdes par tête. Le ministère respire par ses registres. Le malade, lui, étouffe sous les ventilateurs en panne.


Haïti vit sous la menace des armes. Chaque jour, des corps mutilés, des âmes suspendues entre vie et mort sur des brancards vacillants. La santé n’est plus un service public, elle est devenue un champ de bataille. Le soin est un acte de souveraineté, un geste de résistance nationale.


Pourtant, ce budget ne déclare aucune guerre sanitaire. Il ne parle ni d’urgence, ni de survie collective. Il maintient la façade. Il entretient l’illusion. Il n’immunise pas la République contre sa propre décomposition.


Dans les couloirs étroits des hôpitaux, les soignants ne comptent plus les crédits alloués : ils comptent les minutes avant que le dernier souffle s’échappe. Les chiffres du ministère n’ont pas d’odeur ; la mort, elle, en a une — celle du désinfectant épuisé et des draps non changés.


Le budget est rationnel, pour eux. La souffrance ne l’est pas. Qui comptabilise la peur des mères à l’aube ? Qui budgétise les cris des enfants privés d’oxygène ? Qui inscrit au grand livre de l’État le prix du désespoir ?


Dans chaque centre de santé, il reste une obstination — celle de soignants héroïques, qui tiennent la ligne sans gants, sans moyens, mais avec dignité.


Le MSPP administre des chiffres ; le peuple, lui, administre sa survie. Et tant que la raison comptable primera sur la raison humaine, Haïti comptera ses morts avant ses réformes.


Un budget peut équilibrer les colonnes, pas les consciences. Et un pays qui laisse dépérir ses hôpitaux signe, sans le dire, son propre certificat de décès.


Il n'appartient à l'homme qui marche de diriger ses pas.

 
 
 

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